François Daireaux est un arpenteur qui souvent inscrit son mouvement, ses déplacements, l'Inde et la Chine constituant ses terrains privilégiés. Il fixe ici posément son regard et le nôtre sur des postes de travail dans ces usines textiles de l'atelier du monde. Le travail et la matière sont un incessant mouvement formant des boucles étourdissantes, la figure humaine est happée par ses tâches répétitives, entourée de sons machiniques, de cliquetis. Le discours sur l'aliénation est limpide, ces corps n'ont d'ailleurs pas de visages une bonne partie du film. Mais sans rien sacrifier de son traité sur l'asservissement, François Daireaux multiplie les renvois au cinéma, trop frappants pour être hasardeux : les toiles blanches devant lesquelles est planté un regard, comme happé, absent à lui-même ; les rotatives et poulies par lesquelles passe le textile rappellent les enrouleuses pour la pellicule d'une table de montage ou d'une visionneuse.

Arnaud Hée
Programmateur, enseignant et critique