Résumé
Une vingtaine de personnes lisent un livre ensemble depuis trente ans : Finnegans Wake, de James Joyce. De la première à la dernière page cela leur prend onze années. Une fois arrivées au dernier mot – un “the,” très énigmatique –, elles recommencent au premier mot – “riverrun”. C’est à présent leur troisième lecture. Joyce avait prédit que son texte, inépuisable, engendrerait des siècles d’interprétation. “Quel livre effroyable ! Nous irons en enfer pour l’avoir lu !”
L'avis de Tënk
Une bande de grands enfants chaussent leurs lunettes comme d’autres des crampons – des lunettes d’avoir trop lu, de s’être penché sur trop de textes – et font déferler leur imaginaire et leur érudition pour tenter de comprendre les mots de Joyce. Ou, davantage que pour les comprendre : pour ouvrir ces mots, libérant des tumultes de formes et de directions.
L’atmosphère rieuse, parfois triviale, est aussi teintée d’un recueillement presque religieux autour de ce texte qui semble contenir le monde. Dehors, l’hiver endort la vie ; dedans, on s’émerveille du travail de la langue et de ce que l’humanité (auteurs comme lecteurs) peut en faire.
La recherche au long cours de ce cercle de lecture peut sembler improductive, elle se révèle essentielle. Dora Garcia filme l’investigation avec un suspense exquis ; ici les doigts caressent les feuilles, saturées de notes, comme des talismans.
Charlène Dinhut
Programmatrice et commissaire d'exposition