Résumé
Au Burkina Faso, après l’insurrection populaire d’octobre 2014, Bikontine, un jeune poète, décide de partir à la rencontre de ses concitoyen·nes le long de l’unique voie ferrée du pays. Du Sud au Nord, de villes en villages, d’espoirs en désillusions, il met à l’épreuve son rôle de poète face aux réalités d’une société en pleine transformation et révèle en chemin l’héritage politique toujours vivace d’un ancien président : Thomas Sankara.
L'avis de Tënk
Pour son premier long métrage, Lucie Viver accompagne seule le poète Bikontine. Elle tient la caméra et fait la prise de son. Et les voilà partis sur la grande diagonale du chemin de fer, du Sud-Ouest vers le Nord. Sankara avait invité son peuple à prolonger la ligne au-delà de Ouagadougou sans aide extérieure, la fameuse "bataille du rail". Les paysages changent, d'abord verdoyants puis sahéliens et arides, à l'image de Bikontine mais aussi du Burkina qui va d'espoirs en désillusions. À chaque gare une halte, des rencontres improvisées. C'est surtout aux travailleurs que s'intéressent Bikontine et Lucie, qui met en scène sans apparaître à l'écran.
Comment garder l'espoir alors que tout devient aride ? Bikontine joue l'équilibriste sur les rails au-dessus du vide… Pas de poésie sans prise de risque. Pas de création sans courage. Il est un corps errant, ouvert et incertain, fort de ses mots mais qui n'en fait pas des discours, à l'unisson de la guitare mélancolique de Rodolphe Burger mais aussi de ses coups de rage comme dans "Bled Number One" de Rabah Ameur-Zaïmeche. Dans son épreuve initiatique, lonesome cow-boy qui brave le vertige, il hésite encore entre l'ailleurs et l'ancrage de Sankara, et avec lui toute une société.
Olivier Barlet
Critique de cinéma et rédacteur pour Africultures