On peut être strict sans être froid. On peut prendre les habits de l'austérité pour mieux parler de chair. On peut rendre une marche de granit émouvante et métaphysique, et drôle une pompe à essence. Voilà Christophe Loizillon qui nous livre six plans-séquences, chacun titré du nom d'une chose minérale – or, fossile, etc. Il y a plusieurs couches de temps, dans ce film. Il y a le temps des plans qui, vraiment, attise la curiosité du regard, nous fait tout fouiller des yeux. Il y a aussi le temps des humains qui les peuplent : un château de sable, un baiser, une lumière allumée au matin – petites choses primordiales. Et puis il y a le temps très long des cailloux. Celui qui efface le château de sable mais en garde les grains pour une prochaine génération. Celui qui use un tout petit peu la pierre sous le passage presque négligeable des pas humains. Celui qui dépasse de loin le temps des amours et des baisers, même fougueux, et qui fait que les bijoux dureront bien plus longtemps que nous.

Jérémie Jorrand
Responsable de l'éditorial et de la programmation de Tënk