Résumé
Un homme revient, après cinquante ans, à Chinatown pour s’occuper de sa mère mourante. Il est bibliothécaire, homosexuel, observateur, imitateur. Il passe son temps à collecter des images et nous les observons avec lui. Essai raconté du point de vue d’un homme, “Touch” est aussi une fiction, car cet homme est un personnage inventé, un amalgame de recherches, d’interviews, de propos off, de secrets, d’invraisemblances et de désirs flottants. Cet homme, qui ne nous dit jamais son nom, revient à la fois comme un initié et un étranger dans un quartier dont il s’est échappé aussi vite qu’il a pu à l’adolescence.
L'avis de Tënk
En ménageant un décalage entre les paroles du personnage qui se raconte ici et les sous-titres qui viennent parfois les contredire ou les compléter, Shelly Silver introduit dans son récit un trouble qui met à mal toute notion de vérité objective. Elle affirme l’ancrage d’un regard circonscrit aux limites d’un corps mais qui peut les transcender par l’imagination. Le geste d’invention du personnage, qui projette ses propres souvenirs sur les archives d’autrui, redouble celui d’une cinéaste qui tresse des faits réels et des récits possibles pour faire briller son environnement d’un éclat plus vif. À travers ses chantiers, ses fêtes et les visages extraits de ses foules, un quartier chargé d’histoire prend une nouvelle épaisseur : celle que confère le contact d'un regard avide.
Olivia Cooper Hadjian
Membre du comité de sélection de Cinéma du réel,
Critique aux Cahiers du Cinéma