Résumé
Dans des camps de concentration et d’extermination de la Seconde Guerre mondiale, une poignée de déportés ont risqué leur vie pour prendre des photos clandestines et tenter de documenter l’enfer que les nazis cachaient au monde. En arpentant les vestiges de ces camps, le cinéaste Christophe Cognet recompose les traces de ces hommes et femmes au courage inouï, pour exhumer les circonstances et les histoires de leurs photographies. Pas à pas, le film compose ainsi une archéologie des images comme actes de sédition et puissance d’attestation.
L'avis de Tënk
Poser la question de l’image dans des camps de concentration et dans un centre de mise à mort tel qu’Auschwitz II, c’est évidemment se placer dans un débat éthique et esthétique. Amener la photographie – au sens propre, matériel – en ces lieux avec cette approche phénoménologique, c’est se placer en intelligence avec le « parti de l’image » plutôt que celui de l’irreprésentable, de l’interdit. C’est dans une haute conscience des vives controverses qu’agit Christophe Cognet, qui ne choisit pas l’opposition mais plutôt une sorte de rapprochement – le cinéaste déambulant au présent dans les lieux renvoie d’ailleurs à la démarche de Claude Lanzmann. À pas aveugles prend acte du moment archéologique que vit l’écriture de l’histoire et de la mémoire des camps – à la suite de « l’ère du témoignage » –, il rend un hommage vibrant au regard de ceux qui s’y sont risqués, à travers une archéologie du point du vue, dans une sorte de réincarnation de celui-ci.
Arnaud Hée
Programmateur, enseignant et critique