Résumé
« Dans son petit bureau encombré de livres et d’articles de sport, je propose à l’écrivain Percival Everett d’explorer son œuvre et sa façon de travailler. Pendant nos échanges, je projette des images d’archives, des films et des paysages sur les murs de la pièce. Elles envahissent l’espace et résonnent avec ses textes, incarnent son imaginaire. Elles nourrissent aussi nos discussions, l’amènent à évoquer son histoire et une facette plus intime de sa vie. Pendant ce temps, sur une scène de théâtre au décor dépouillé, un acteur lit des extraits de ses textes et devient progressivement le double fictif de l’auteur. Au fil du documentaire, le réel et la fiction se mêlent et nous interrogent. Comment se construisent les romans de Percival ? Que nous disent-ils de l’Amérique contemporaine, des formes de racisme qui s’y perpétuent ? Qu’est-ce que l’engagement en littérature ? »
L'avis de Tënk
Quand Alexandre Westphal a commencé à me parler de ce film, il m’a fait écouter quelques musiques temporaires, des références, des directions… plutôt de jazz. Alors ma première idée, un peu égoïste, était que cela serait une formidable opportunité de retourner à New York, où j’ai habité dans les années 80, pour retravailler avec un ami saxophoniste sur une musique un peu film noir, un peu deconstructed jazz.
Mais après avoir plongé plus profondément dans l’univers de Percival Everett, il m’a semblé que cette idée était bien trop simple. Everett dit « I don’t believe in race » et, si la musique est extrêmement importante pour lui, il refuse, comme en toute autre chose, d’être enfermé dans un stéréotype « noir »… d’ailleurs, dans le film, son « double » dit « j’écoute Mahler, Aretha Franklin, Charlie Parker et Ry Cooder ». Everett écoute aussi, beaucoup, Chopin.
J’ai donc proposé qu’on garde l’idée du saxophone, mais de façon bien différente : il y a des musiques électro-acoustiques, plus ou moins ambient, toutes créées à partir de sons de saxophones transformés, il y a aussi des motifs de Chopin, joués au sax… mais la plupart des sons typés « saxophone » sont en fait issus de la modélisation physique… et souvent joués sur iPad !
Pour moi, cette musique représente en quelque sorte « le saxophone et son double ».
Martin Wheeler
Compositeur
PS : À New York dans les années 80, j’ai beaucoup joué avec un groupe de jeunes musiciens noirs qui jouaient toutes sortes de musique, et qui refusaient catégoriquement, eux aussi, d’être enfermés dans les stéréotypes de « la musique noire ». 40 ans plus tard, certains sont encore parmi mes amis musiciens les plus proches, et c’est peut-être pour ça que l’œuvre de Everett, et ce film, sont si importants pour moi.