Résumé
Film à double signature, celle de l’écrivain disparu et du cinéaste Bernard Queysanne, travaillé à partir du texte initial de Georges Perec, dûment calibré par les auteurs. Une réflexion commune, un propos très concerté ont généré une œuvre novatrice, singulière, hors du temps. En voici le livret - car le film est construit comme une partition musicale, en plusieurs mouvements : un étudiant remet en cause toutes ses activités et tous ses projets et se plonge volontairement dans une sorte d’hibernation. Pendant plusieurs mois, il vit ainsi en dehors du temps, en dehors du monde jusqu’à ce qu’apparaissent les limites et les dangers de cette expérience radicale et c’est douloureusement qu’il reprend pied sur la terre des vivants. Histoire qui induit une recherche formelle et sonore importante, au service de l’idée "d’infra-ordinaire", chère à Georges Perec, qui la sous-tend.
L'avis de Tënk
On aimerait tout d’abord relever la beauté des images et de cette bande-son composée des bruits de la ville (et de la voix de Ludmila Mikaël), où le dehors et le dedans s’entremêlent jusqu’au vertige – vertige du temps et de l’espace. S’émerveiller ensuite de la capacité de Georges Perec (ici avec Bernard Queysanne), en chacune de ses œuvres, livres et films, à saisir une époque, les ambiances qui la caractérisent et les détails qui la composent, les objets et les mots qui en font la couleur. S’étonner comme à chaque fois des nombreuses affinités existant entre Perec et Jean Eustache, “Un homme qui dort” étant bel et bien le contemporain de “La Maman et la putain”. Il l’est également de films d’Alain Cavalier et de Marguerite Duras auxquels on songe ici notamment. Étrange invitation au voyage que ce film-ci – voyage immobile, hypnotique et somnambule au cours duquel vous croiserez peut-être votre double.
Fabien David
Programmateur du cinéma Le Bourguet de Forcalquier