Résumé
Portrait of Jason a été tourné une nuit de décembre 1966 dans la chambre qu’occupe alors Shirley Clarke au mythique Chelsea Hotel à New York. Seul face à la caméra, Jason se met en scène, interprète les personnages croisés lors d’une vie qu’il s’est partiellement inventé depuis son enfance et se raconte, une bouteille de scotch et une cigarette à la main.
L'avis de Tënk
Films précédents de Shirley Clarke, The Cool World et The Connection naviguaient dans des eaux incertaines, entre documentaire et fiction, authenticité et théâtralité, vrai et faux, naturel et artifice, et dans une dimension performative en ce qui concerne le jeu. Portrait of Jason fait cohabiter ces tensions dans un seul corps, et une même psyché. La frontalité, la nudité du dispositif décrète une régime de véracité, d'authenticité, tandis que la cinéaste se signale pour bien signifier son dispositif. Comme une machine qui s'emballe, on est toutefois pris d'un vertige en présence de ce conteur compulsif : est-il seul ou plusieurs, nous raconte-t-il l'histoire de sa vie ou des histoires, ses histoires ou celles des autres, des histoires vraies ou des fables ? Portrait of Jason constitue un objet fascinant, à la fois ludique et théorique, un miroir tendu au cinéma, qu'il soit documentaire ou de fiction.
Arnaud Hée
Programmateur, enseignant et critique